L’homme du feu devenu homme de Dieu

Dans le courant de ce mois, nous aurons la joie d’assister à la consécration et l’installation d’EIie DERNOVOI comme pasteur associé pour le district HONL. C’est toujours une joie d’assister à la consécration d’un homme ou d’une femme au ministère pastoral et de voir que des « jeunes » se lèvent pour Ie service de Dieu. Ici, le terme jeune est inapproprié — même si nous nous sommes rencontrés lors du stage d’insertion des jeunes pasteurs — nous dirons que c’est un homme rempli d’expériences qui se met au service de son Dieu.

1. Qui êtes-vous EIie Dernovoi et quelles sont vos origines?

Je suis né en 1952 dans une famille d’immigrés russes orthodoxes. Mes parents — prisonniers en Allemagne pendant la guerre — sont arrivés après celle-ci en Belgique et se sont installés dans la région du Centre. ils se sont convertis à la foi protestante (Baptiste) grâce au ministère du pasteur Grickmann qui était missionnaire parmi les réfugiés slaves de l ‘ONU. Mon père a été un « Ancien » engagé dans I’Église Baptiste Slave de La Louvière aux côtés du Pasteur Vasil Magal. Le problème de la langue russe s’étant posé à un certain moment pour les enfants, mes parents se sont rattachés à l’Église Évangélique Belge. J’y suis resté jusqu’en 2002, date à laquelle, je suis rentré à la FUTP (*) et me suis rattaché à la paroisse de I’EPUB de Charleroi.

2. Vous êtes un homme de vocation, d’abord homme du feu et maintenant homme de Dieu, et comment franchit-on le pas?

A la mort accidentelle de mon père, ma maman s’est retrouvée seule avec 7 enfants dont j’étais I’aîné des fils. J’ai abandonné mes études d’économie à I’ULB et je suis rentré par hasard chez les pompiers de La Louvière. C’était en 1974 et j’y suis resté près de 35 ans ! J’ai vécu ce travail comme une véritable vocation. La devise des hommes du feu n’est-elle pas « sauver ou périr » ? Les événements du 11 septembre 2001 ont été déterminants. J’ai été marqué par le fait que, lors de la destruction des tours jumelles, l’aumônier retraité des pompiers de New York est allé sur place et est décédé des suites d’une crise cardiaque en donnant l’extrême onction à une victime. Cela a été révélateur. J’étais déjà un chrétien engagé dans ma communauté – en tant que « remplaçant pasteur » – mais j’ai réalisé que je pouvais donner encore plus en mettant ma vie au service du Seigneur.

3. Qu’est-ce qui a été le facteur déclenchant de votre vocation pastorale?

Comme je vous l’ai dit plus haut, les événements de 2001 ont été un facteur déclencheur. L’année qui a suivi, une autre catastrophe survenait en Belgique, celle de Ghislengien; j’assurais le culte ce dimanche-là à I’Église d’Ath et j’ai constaté qu’il n’existait pas d’aumônier protestant dans les services de sécurité (Incendie, Police). ll m’a semblé alors, qu’une telle fonction aurait peut-être valu la peine d’être instituée au niveau national. Mais avant tout, c’est l’exemple de mon père qui a motivé mon désir d’exercer un ministère dans l’Église. Mon père a exercé son ministère dans I’Église « contre vents et marées », à une époque où on travaillait encore 6 jours par semaine et en même temps, il élevait une famille nombreuse de 7 enfants. Il trouvait encore le temps, grâce à Dieu, d’assurer des cultes le dimanche après-midi.

4. Quelle a été votre démarche et qu’attendez-vous de votre ministère pastoral?

L’engagement de chrétien engagé qui était le mien m’a fait réaliser que la tâche pastorale ne peut pas être accomplie sérieusement et de manière professionnelle si on n’a pas une base théologique solide. La bonne volonté et l’aide du Saint Esprit ne sont pas suffisantes ! D’où ma vocation tardive à la FUTP de BruxeIles.
Mes seules motivations sont celles du service et de l’amour du Seigneur. J’ai donc intégré la Faculté dès 2002 et ai obtenu en 2006 une licence en théologie protestante. Je recherche pour l’Église un juste équilibre théologique entre les sensibilités libérale et évangélique ; je souhaite développer davantage un œcuménisme pratique plus fraternel au sein du monde protestant belge comme je l’ai vécu entre étudiants et professeurs, à mon grand étonnement d’ailleurs et sans doute à cause de mes nombreux préjugés, à la FUTP de BruxeIles. Comme je souhaitais un ministère de pasteur associé bénévole, mon vœu est maintenant réalisé: d’homme du feu je suis devenu, par Sa volonté, homme de Dieu.

(*) Faculté Universitaire de Théologie Protestante de Bruxelles

Entretien réalisé par Brigitte ALESSANDRONI pour Mosaïque, février 2012 et publié avec son aimable autorisation.