Prédication apportée par le pasteur Dernoncourt, le 20 mai 2012 pour la journée des vocations au sein de l’EPUB.
Lecture biblique : Éphésiens 4, 7 à 16
Une question pour commencer :
Que cherchons-nous en venant à l’église ?
Cette question s’adresse à celles et ceux qui viennent s’asseoir et écouter.
Dans chaque communauté il y a deux niveaux :
1- ceux qui sont du public, qui assistent
2- ceux qui sont engagés dans un service, qui exercent un ministère.
Théoriquement, la communauté chrétienne est semblable à un théâtre ou des gens vont assister à un spectacle, (les spectateurs) donné par d’autres, (les acteurs).
Cette vision théorique de la communauté ecclésiale n’est pas celle du Nouveau Testament.
Les apôtres n’ont pensé qu’à une seule forme d’assistance, c’est le peuple de Dieu.
Pas de clergé d’un côté et le peuple de l’autre de telle sorte que certains ne feraient que de donner et d’autres de recevoir. Cette vision de la communauté est paralysante et inefficace.
En lisant les écrits bibliques fondateurs de la communauté, c’est une vision plus engageante, plus gaie aussi qui est pensée pour la vie communautaire.
Si vous le permettez, voyons cela en 6 points en nous référent au texte de Paul aux Ephésiens, sans pour autant perdre de vue la thèse théorique de « spectateurs et d’acteurs ».
1. Tous sont appelés à servir, chacun de nous est une articulation du corps du christ.
Les versets 7 et 16 le soulignent.
Tous appelés, c’est le sacerdoce universel.
Ce principe qui est source de division est la force du protestantisme.
Depuis la Réforme, chaque baptisé est « prophète, prêtre et roi » sous la seule seigneurie du Christ. Ce concept anéantit les principes de hiérarchie dans l’Eglise. Chaque baptisé a une place de valeur identique aux yeux de Dieu. Chaque croyant est donc appelé à un ministère dans le corps du Christ.
Selon le texte d’Ephésiens 4, les ministères d’apôtre, de prophète, d’évangéliste, de pasteur et d’enseignant ont pour vocation de rendre apte tout le peuple, toute l’Eglise et chaque chrétien en particulier à accomplir son service.
Il n’est pas dit que les apôtres, les évangélistes, les pasteurs édifient l’église mais ils perfectionnent les saints, les chrétiens, et se sont ces derniers qui édifient l’église.
« C’est par lui que le corps tout entier, bien coordonné et uni grâce à toutes les jointures qui le desservent, met en œuvre sa croissance… » (Eph. 4/16)
Il n’est donc pas possible d’être chrétien spectateur.
Tout chrétien quel que soit son âge, son expérience, ses capacités est un membre et une articulation du corps de Christ.
Toutes les articulations du corps sont importantes. On ne les utilise pas toutes en même temps, elles ne se trouvent pas au même endroit, elles n’ont pas toutes la même fonction mais elles sont toutes importantes. Sinon le corps est raide, sans souplesse et handicapé, incapable de faire certains mouvements.
Il en est de même de l’église.
Prenons notre communauté de Charleroi pour trouver les illustrations de ce qu’avance Paul :
Dans le cadre du culte, s’il n’y a personne pour accueillir, il manque de chaleur à l’église. Certes, le culte peut avoir lieu et beaucoup d’activités mais il manque une dimension de bien-être, de joie. L’accueil est un ministère.
Il en est de même pour les articulations que sont les dons de service, d’aide, de gestion, de travaux, de libéralité, et bien sur les plus classiques et souvent les seuls que l’on croit vraiment utiles simplement parce qu’ils sont visibles : parole, présidence, musique, chant, service d’enseignement auprès des enfants, des ados et des adultes, …
L’église pour être vraiment opérationnelle et souple doit se découvrir un maximum d’articulations. Plus il y a d’articulations dans la communauté et plus l’action est précise.
Il est donc important que chaque croyant trouve sa place dans le corps de Christ. Il n’est pas possible que nous restions spectateurs. Chacun de nous est une articulation du corps de Christ qui rend tout le corps plus souple, plus apte à l’action, plus précis dans cette action. Le refus de prendre sa place dans le corps handicape tout le corps.
2 – Le but du ministère de chacun c’est :
Parvenir ensemble à l’unité de la foi
La connaissance du fils de Dieu
Devenir adultes et atteindre la stature parfaite du Christ
Ne plus être emportés ni trompés
Grandir en tout vers le Christ
Ces 5 objectifs sont appelés à se développer par l’engagement, le travail de chacun.
Les ministères d’apôtre, prophète, évangéliste, pasteur et enseignant ont quant à eux à aider chacun à trouver sa place, susciter les ministères et les former afin de les rendre aptes à accomplir, chacun, son service spécifique. En effet ce n’est pas aux apôtres, prophètes, pasteurs,… à faire que l’église s’édifie mais à faire que chacun dans l’assemblée soit APTE à accomplir son service, de sorte que l’église se développe par elle-même :
« Ainsi, lorsque chaque partie fonctionne comme elle doit, le corps entier grandit et se développe par l’amour. » (Eph. 4/16)
Les ministères de pasteurs, évangélistes, apôtres, prophètes et enseignants ne font pas le service ou le travail des membres de l’église mais donnent à ceux-ci les aptitudes pour le faire, c’est tout le monde qui édifie la communauté. C’est la vision que l’apôtre Paul développe dans ce célèbre chapitre 4 de l’épître aux Ephésiens.
Cette vision biblique de la communauté est très jolie et bien sur idéale. Mais il est difficile de l’appliquer car il y a des blocages.
3- Les blocages.
J’en relève deux :
Le peuple de l’église ne veut pas être rendu apte au service : d’après une étude faite : seulement 20% de chrétiens venant au culte sont actifs, les autres 80% se reposent sur le ministère de quelques uns, ils viennent en spectateurs, ils sont bien, ils jouissent assez égoïstement de la communauté mais cette communauté fonctionne grâce à un noyau.
Les ministères qui devraient rendre apte le peuple ne font pas ce qu’ils doivent faire. Soit parce qu’ils croient que c’est à eux à tout faire, soit par crainte de perdre le pouvoir, d’être dépassés, de laisser l’église devenir ce qu’ils ne désirent pas qu’elle devienne, ou ….
Des remèdes sont donnés et peuvent être facilement appliqués.
Soyons attentifs à la monopolisation des ministères. C’est à cela que servent les assemblées d’église. Tous peuvent s’exprimer et donner sa confiance à ceux qui les représentent dans les diverses structures misent en place. La croissance de l’église est ainsi assurée.
Soyons attentifs à la peur de se mouiller et de se tromper, vous ne pouvez pas trouver vos dons du premier coup et sans faire d’erreurs.
Comment appliquer cela efficacement, comment motiver chacun ?
C’est le 4ème point de notre réflexion.
4- Chacun doit rechercher ses dons, sa vocation, mais avec intelligence.
Prière
Seigneur, donne à tous les habitants des villes et des villages de tous les pays, le pain et la paix, un toit et du travail, la possibilité de s’instruire et d’être informés honnêtement.
Fais de moi, Seigneur, tes yeux, ton cœur, tes mains !
Donne aux réfugiés, aux migrants, aux personnes d’une autre langue, d’une autre peau, d’autres coutumes, d’être accueillis, respectés, écoutés.
Fais naître dans nos quartiers la vraie fraternité.
Fais de moi, Seigneur, tes yeux, ton cœur, tes mains !
Rends justice aux pauvres, aux opprimés, à ceux qu’on méprise ici et partout ; délivre les victimes des puissants ; rends à tout être humain sa dignité.
Fais de moi, Seigneur, tes yeux, ton cœur, tes mains !
C’est d’abord un travail personnel sur soit suite à une interpellation.
Se connaître soi-même, connaître ce qui nous habite, se découvrir soi-même dans l’intimité avec Dieu, dans l’action et le contact avec les autres. Je découvre qui je suis dans la communion fraternelle, les autres vont m’aider à me découvrir, à condition que cette relation soit saine, équilibrée c’est-à-dire que la relation avec les autres ne soit pas basée sur la comparaison et l’imitation de ce que les autres sont et font.
Pas de mimétisme. Je suis différent, il y aura toujours des nuances entre mon référent et moi. Nous avons trois articulations à notre index, elles sont toutes les trois des articulations et cependant elles sont différentes toutes les trois. Ainsi pas de fusion et pas de comparaison. Ne pas rechercher un ministère uniquement en regardant les ministères les plus en vue, ce n’est peut-être pas pour ceux-là que Dieu nous a mis sur la terre. Dieu nous appelle peut-être à une place, un service que nous ne connaissons pas encore, qui n’est pas visible encore dans l’église qui est nôtre.
Regardons aussi les vrais besoins de la communauté.
Quel que soit le ministère, il est nécessaire de « se former, se perfectionner ». Le terme de perfectionnement que nous trouvons en Eph 4/12 peut être traduit par « être rendu apte au service », Cette expression fait référence à tout un processus de formation, stage, écolage qui sont donnés par les apôtres, enseignants, pasteurs aux chrétiens afin que ceux-ci édifient le corps de Christ.
L’ouverture et la souplesse de l’esprit sont aussi nécessaires.
5- Être ouvert aux changements et à l’adaptation sur le terrain où l’on est appelé à travailler.
Les charismes et le service (ministère) doivent s’exercer avec des nuances. Il faut s’adapter et ne pas vivre le service imperturbablement de la même manière où que l’on soit. Toutes les personnes ne sont pas du même moule ; selon les lieux, les circonstances, la culture, la sagesse, la raison.
6- Travailler en communauté nécessite de l’ordre, de l’organisation, une vraie direction.
Plus il y aura des membres d’une communauté qui s’engagent, plus foisonnante est la manifestation des dons spirituels, plus importante sera l’obligation de structurer, diriger et canaliser. Inversement, moins il y a des gens qui travaillent et plus ceux qui travaillent sont libres.
Travailler ensemble nécessite une discipline
Plus les gens sont mis au travail meilleur doit être l’encadrement, car plus grand est le risque de désordre, plus important doit être l’amour fraternel et la patience. Le rôle des ministères d’apôtres, pasteurs, enseignants sont non seulement appelés à former les croyants mais également à susciter, coordonner, discerner, canaliser, harmoniser les forces pour édifier et unir la communauté.
C’est ce que dit Paul en 1 Cor. 12 à 14 quand il énumère tous les dons et ministères, il rappelle le cadre pourvu par Dieu pour l’exercice de ces dons. C’est pourquoi ne vous sentez pas frustré par un cadre, sauf exception, c’est normal que vous ne possédiez pas toute liberté d’exercer vos ministères car vous l’exercez pour édifier, unir, solidifier, amener à la stature parfaite du Christ.
Il est obligatoire de respecter un plan.
Voilà la réflexion que suscite ce passage de la lettre aux Ephésiens. Tout n’est pas dit, mais la matière à réflexion est là et ouvre à un questionnement qui sera la conclusion de la prédication de ce matin.
Sommes-nous prêts à former un seul peuple avec les autres croyants, à former le corps de Christ ?
Sommes-nous prêts à être une articulation du corps de Christ ? Chercher notre place, notre identité propre en Dieu et dans une authentique communion fraternelle, la mieux équilibrée possible ?
Sommes-nous prêts à travailler à la suppression de la catégorie spectateurs, consommateurs en nous engageant quel que soit notre âge ? Certes je me joins à la communauté pour recevoir, mais aussi pour servir, me préoccuper des autres, me décentrer de moi-même, me mettre en marche et à l’œuvre.
Sommes-nous prêts à travailler dans un esprit de confiance avec tous les autres et accepter que ceux-ci limitent toujours notre liberté personnelle ?
« C’est ainsi que Jésus-Christ rend le peuple de Dieu apte à accomplir son service, pour faire croître le corps du Christ.
Ainsi le corps forme un tout solide, bien uni par toutes les articulations dont il est pourvu. Ainsi, lorsque chaque partie fonctionne comme elle doit, le corps entier grandit et se développe par l’amour. » (V 12 & 16)
Amen.
Bernard Dernoncourt