Psaume 130 : Au fond de la détresse

Prédication apportée par le pasteur Dernoncourt lors du culte du 24 juillet 2011 et largement inspirée de celle du pasteur Van Trappen de Genève donnée le 10 mars 2002 dans le temple de Champel (Suisse).

Ps 130
Romains 8, 31 à 3

Après le psaume de louange 147 où Dieu se fait médecin, le psaume 12 qui est un appel au secours qui témoigne de l’intervention divine, le psaume 2 qui loue surtout le représentant de Dieu au sein de son peuple : le roi ; voici le psaume 130 qui comme le psaume 12 fait partie de la famille des « drames de libération ».
C’est vrai qu’il est dramatique ce texte, et c’est peut-être là ce qui le rapproche de nous.
Qui dans sa vie n’a pas connu d’embûches ?
Qui n’a pas connu la désolation la plus profonde ?
Des situations provoquées par un décès, la maladie, une séparation ; voire même à cause d’un état d’esprit personnel devant la non-conformité d’une vie en rapport avec son être profond.
Combien de fois, dans nos entourages n’avons-nous vu des connaissances ayant un âge réputé « sage », abandonner tout pour recréer une autre vie !
Ce fut mon cas à l’âge de 44 ans, lorsque j’ai décidé de reprendre des études de théologie. Peut-être que mes proches, un jour où le cours d’Ancien Testament ou d’hébreu était comme du chinois pour mon esprit déjà trop âgé, m’ont entendu proclamer comme le psalmiste :

Du fond de la détresse, je t’appelle au secours, Seigneur.

Bref, qui ne s’est pas retrouvé un jour dans gouffre et a crié vers Dieu :

Écoute mon appel, sois attentif quand je te supplie. ?

Ces paroles du psalmiste ne peuvent vraiment être comprises que par celles et ceux qui ont expérimenté et éprouvé ce que veut dire le fond de l’abîme. Au moment où tout semble s’écrouler et où, puisant spontanément dans ses dernières forces on peut s’adresser à Dieu.
Ici, pas besoin de prière structurée, pas de réflexions, rien…
Sinon un cri qui peut encore sortir des entrailles.
En pareille circonstance, le doute accompagne tous les actes de la vie, y compris cet
ultime sursaut de prière.
Seigneur, Père, toi-même, tu pourrais garder le silence, tu pourrais me négliger et dédaigner mes cris misérables.
Fais que tes oreilles soient attentives à mes cris et les perçoivent comme il se doit.
Personne ne peut mieux que toi entendre ma douleur. Père ne te retourne pas contre moi.

Certes, quelques réconforts des proches pourraient être apportés, mais comme le dit la sagesse : c’est dans le besoin que l’on reconnaît les copains !
Toi seul peux comprendre !

Et si au cas où, comme eux, tu ne regarderais que les parties de mon être qui font obstacles à ma communion avec toi, si tu te fixais sur elles, sache que

De toute mon âme, je compte sur le Seigneur, et j’attends ce qu’il va dire.

Car personne n’agit comme toi qui dédaigne et néglige les infidélités et les manques de reconnaissance envers toi et envers les autres. Comme le dit l’apôtre Paul :

Que dire de plus ? Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ?

Père n’entre pas en jugement avec moi, personne, aucun être vivant ne serait trouvé parfait, juste devant toi. Je me tiens en ta présence tel que je suis, sans masque, je t’implore, je connais mes défaillances mais c’est auprès de toi et de toi seul que je peux retrouver le pardon.

Mais pourquoi se lamenter et crier sa peine, même à Dieu, en dernier recours, sinon parce qu’il existe encore au fond de nous une espérance ?
Celle d’être entendu, celle d’être restauré.
Même si le processus de guérison peut-être long, il y a cette espérance qui maintient en éveil, qui permet de garder la tête hors de l’eau.
Le psalmiste traduit cette espérance par le v5 :

De toute mon âme, je compte sur le Seigneur, et j’attends ce qu’il va dire.

L’espérance, c’est le premier bourgeon d’une guérison qui commence.
Elle est le signe avant coureur qu’une autre réalité est possible.
Que le désespoir qui nous hante, n’est pas la réalité dernière.
C’est à ce stade que cohabitent deux sentiments bien distincts et pourtant simultanés :

  • L’insécurité et la déstabilisation
  • L’idée d’un lendemain meilleur

Cette réalité, il convient de l’habiter, de ne pas la fuir, c’est en elle que l’on grandira.
Elle sera pédagogue de la grâce du Père, parce que cette attente qui occupe tout mon être est dirigée dans ma prière vers Dieu.
Petit à petit, façonnant son chemin, à travers mes revirements, mais aussi à travers mon reste de foi, l’espérance deviendra confiance en ce Père qui ne nous abandonne pas. Il a promis la grâce et le secours à tous ceux qui lui font confiance.
Quel que soit le délai plus ou moins court ou immensément long de cette attente du secours du Père :

Je compte sur le Seigneur plus qu’un soldat de garde n’attend le matin

Un jour, c’est avec stupéfaction et reconnaissance que l’on découvrira cette grâce grandissante que Dieu accorde à tous.
Chers amis, lorsque ce jour nous aura atteints, à notre tour, nous pourrons raconter et témoigner de ce que nous avons vécu dans de tels moments à ceux qui seront en train de les traverser. Cela aidera notre prochain à faire comme le psalmiste l’expérience de la grâce de Dieu.
Il a une manière bien à lui d’être là quand on ne s’y attend pas. Mais c’est sa manière, une manière paternelle, qu’il a pour accomplir sa justice et communiquer son amour.

Oui, écrivait Paul et je m’associe à cette déclaration, j’ai la certitude que rien ne
peut nous séparer de son amour : ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni d’autres
autorités ou puissances célestes, ni le présent, ni l’avenir, ni les forces d’en
haut, ni celles d’en bas, ni aucune autre chose créée, rien ne pourra jamais
nous séparer de l’amour que Dieu nous a manifesté en Jésus–Christ notre
Seigneur.

Amen