En musique et en italien : depuis le début, reprenez au début d’une partition, en tout ou partie.
Journal Le Soir, du mardi 26 février : un article sur la peine de mort aux USA, intitulé : « La soif de vengeance détruit les familles ».
Vicki Schieber, universitaire, la septantaine alerte, lutte contre la peine de mort au Maryland et ailleurs aux USA.
Elle brandit la photo de sa fille et dit (je me permets de recopier ses paroles citées dans Le Soir) : « Ce n’est pas ce qui vous arrive dans la vie qui importe, c’est ce que vous en faites. La soif de vengeance peut vous détruire, et le système exacerbe ce sentiment. On dit aux familles des victimes qu’une condamnation à mort va les apaiser. C’est tout le contraire. Elles attendent 10 ou 20 ans avant une éventuelle exécution. Un criminel a tué ma fille, je ne le laisserai pas détruire ma famille. »
Shannon Schieber, 24 ans, promise à un avenir brillant, douée depuis la plus petite enfance, doctorante dans une des meilleures universités en économie, à Philadelphie, est tuée par un violeur en série dans son appartement, à la veille de ses derniers examens.
Shannon donnait des cours à des jeunes défavorisés de sa ville.
Tout devait porter Vicki à crier vengeance : la douleur, le désespoir, le vide causé par la mort atroce de sa fille. Elle a choisi une autre voie : « Personne n’a le droit de prendre la vie. Je crois au pardon, au cycle de la vie. »
Vicki porte une croix en pendentif, autour du cou.
Vicki est une personne extraordinaire. Elle seule peut parler comme elle le fait, dans la situation qui est la sienne. Elle a choisi le chemin difficile, celui du combat qui est le sien, contre la peine de mort.
Il n’est pas besoin de vivre une telle tragédie pour s’empoisonner la vie : combien de fois ne nous gâchons-nous pas l’existence en « repassant dans notre cœur » ou dans notre esprit, tous les griefs accumulés contre l’un ou l’autre. Cela nous use, nous mobilise l’esprit, nous ronge comme de la rouille, nous tue à petit feu. Nous avons toutes les bonnes raisons d’en vouloir à celui qui nous a offensés, blessés – et cela, c’est un fait objectif – mais, comme dit Vicki, ce qui importe, c’est ce que nous faisons de cette blessure, de cette douleur, de ce manque, de cette perte.
Nous pouvons nous y arrêter, butter constamment contre, nous y accrocher et arracher comme à un méchant clou qui dépasse, nous pouvons laisser la blessure s’infecter, gagner le corps entier.
Ou.
Ou, comme Vicki, refuser de nous laisser détruire par les griefs, même justifiés, les transformer en un combat pour une juste cause, les sublimer dans le don de nous-mêmes, dans l’ouverture à ceux qui ont besoin de nous, dans des projets pacificateurs.
Vicki a une croix au cou. Au lendemain de vendredi saint et de Pâques, cette croix nous rappelle que nous sommes tous dans une nouvelle ère, celle où les mots « impossible », « plus jamais », « rancune », « désespoir », « regrets », « aigreurs », sont déjà abolis en Celui qui, innocent, a payé pour notre libération totale.
La libération de nous-mêmes aussi.
Si nous le voulons.
Da capo. Reprenons au début, répétons une portée, avec une interprétation toute renouvelée.
Yvette Vanescote