Le mystère d’une présence, 4ème Avent 2011

2 Samuel 7, 1 à 16
Romains 16, 25 à 27
Luc 1, 26 à 38

Dieu interpelle de manière surprenante ! Beaucoup de croyants peuvent en témoigner.
L’évangile d’aujourd’hui donne très peu d’élément sur Marie, sinon qu’elle est jeune fille fiancée. Apparemment elle a du caractère, car contrairement à l’histoire de Noël selon Julos Beaucarne, Marie ne dit pas « oui, oui ! », elle pose une question qui est assez matérialiste :

Comment cela se produira-t-il puisque je n’ai pas de relation avec un homme ?

La réponse que donne l’ange apporte encore un peu plus de mystère à ce récit !
En posant cette question à son mystérieux visiteur, elle ne doute pas et ne fait pas vœux de chasteté, elle désire un peu plus d’éclaircissement sur la mission que Dieu lui confie. Elle veut savoir ce qu’il faut faire pour que la volonté de Dieu puisse se réaliser en elle. Comment sa vocation peut s’accomplir pleinement.
Ecoutons-là témoigner de cette visite qui a changé sa vie:

Je m’appelle Marie et il m’arrive quelque chose d’extraordinaire.
Un beau matin, Dieu est entré dans ma vie.
Pourtant, je ne l’attendais pas particulièrement, mais il est venu pour me parler au travers de son ange. Et cette visite a tout changé dans ma vie.
D’abord, j’ai changé, parce que je suis devenue quelqu’un à ses yeux, moi qui ne suis qu’une petite jeune fille, moi qui ne suis qu’une petite fiancée sans grande lignée, Dieu est venu me trouver, me parler, m’appeler par mon nom et me rassurer. Quand Dieu entre dans ta vie, tu sais que désormais tu n’es plus une inconnue, mais tu deviens une personne aimée.
Mais l’entrée de Dieu dans ma vie a laissé une trace, je suis enceinte. Bien sûr, à mon âge, ce n’est pas si extraordinaire.
Ma cousine Elisabeth attend aussi un fils, et là, ça tient du miracle. Moi ma grossesse est inhabituelle parce que je n’ai pas connu d’homme pour que ce petit vienne habiter en mon corps.
Enfin, pour le moment, je dois dire que je ne remarque pas grand-chose de spécial. Je sais que j’attends cet enfant parce que l’ange l’a dit et je suis troublée, comme chaque femme enceinte probablement, parce que je suis face à un ou une inconnu-e qui va bouleverser tout le reste de ma vie.
Quand Dieu fait germer la vie en toi, tu ne le sais pas forcément de toi-même, mais tu le devines au travers des indices qu’il laisse : sa parole, son œuvre chez les autres qui t’entourent.
C’est ainsi que le salut entre dans le monde, par toutes ces germinations qui s’effectuent en nous. Bien sûr, le fruit que je porte est vraiment extraordinaire, mais l’amour du prochain, la vie en communauté d’Eglise, n’est-ce pas tout aussi extraordinaire ?

Marie n’a plus posé de question, elle a juste attendu la venue de celui qui se formait dans son corps et qui allait faire de grandes choses. A-t-elle éclairci le mystère de la présence de Dieu en elle ? Je pense que oui, car à partir de cette rencontre avec l’ange, le principal était de participer au plan de Dieu.

Bien avant elle, un de ses ancêtres a voulu éliminer le mystère de la présence de Dieu en voulant le faire entrer dans une construction humaine. Mais Dieu par la bouche de Nathan, le prophète, s’y oppose ! Le refus de construire le temple signifié à David est justifié par une série de rappels historiques qui insistent sur la primauté de l’initiative divine dans sa relation avec son peuple. De manière similaire, les promesses dynastiques insistent sur la volonté divine qui fera une maison à David (v. 11), qui affermira le trône de sa descendance (v. 13) et qui la corrigera (v. 14). Face à cette initiative divine abondamment soulignée, le texte tourne presque en dérision l’initiative architecturale de David : «Est-ce toi qui me bâtiras une maison pour que je m’y installe ?».

La «prophétie de Nathan» soulève la question des rapports entre le pouvoir royal et le sacré. Le refus de l’édification du temple prend le contre-pied des conceptions classiques des relations entre le roi et son Dieu. Même sans l’intermédiaire d’une institution sacerdotale forte et stable, garantie et soutenue par le pouvoir royal, une relation bénéfique entre le peuple, la dynastie régnante et Dieu peut être entretenue. C’est ainsi que, malgré l’absence de temple, David peut recevoir un oracle dynastique favorable.

Par ce texte, les auteurs veulent sans doute témoigner du fait qu’en dehors du temple, d’autres moyens d’entretenir des liens avec Dieu existent. Bien que les modalités pratiques de ces relations ne soient pas précisées, on peut penser en particulier à la Loi.
Ce message théologique a sans doute représenté un grand espoir à une époque où, suite à l’effondrement du royaume judéen, le temple ainsi que toutes les institutions classiques garantissant les relations avec Dieu avaient été détruites par les envahisseurs babyloniens.
Or l’interdiction de construire, en s’opposant à ce projet, vient remettre David à sa juste place. Il n’est pas maître de la relation qu’il recherche. Au contraire, c’est Dieu lui-même qui décide des rapports avec les hommes.

Ce refus montre que Dieu n’entre pas volontiers dans les cadres religieux fixés par la volonté des hommes. Il s’agit encore de la présence mystérieuse de Dieu et sa liberté d’agir.

PRIERE
Ecoute, Seigneur, les prières de cette communauté assemblée devant toi, viens au-devant de ceux qui marchent dans la tristesse, le doute ou le désarroi.
Fortifie le coeur de ceux qui luttent pour « élever les humbles » et « combler les affamés ».
Entends ce que trop souvent nous refusons d’entendre : la plainte des malades, le cri des prisonniers, le silence des paumés, des oubliés, des aliénés.
Donne courage et volonté à ceux qui ont devoir de guider ton peuple,
à ceux qui ont mission de gouvernement et de rassemblement, à ceux qui se battent pour que soit satisfaite l’attente immense de notre terre
à plus de justice et de fraternité.
SEIGNEUR, puisque nous vivons dans la proximité du mystère de ta venue, fais que notre tâche, nos amours et nos luttes soient régénérées par cette espérance.

On peut tirer un parallèle avec la situation du croyant. Notre situation.
Nous cherchons le plus souvent à mettre en place des cadres destinés à favoriser nos rapports avec Dieu. Ainsi, nous pouvons être tentés de considérer les rites religieux publics ou privés comme les moyens de le rencontrer.

Pourtant l’Evangile nous rappelle que Dieu est ailleurs : dans la rencontre avec le prochain, dans une main tendue, dans un sourire partagé.
Néanmoins, l’Inverse peut aussi être vrai. L’action sociale n’est pas le lieu exclusif du rapport au sacré. Il faut aussi savoir se rappeler que Dieu peut parfois être rencontré dans les églises !

C’est là le mystère de la présence de Dieu ! Ce qui a donné naissance à l’expression : les voies du Seigneur sont impénétrables.

Soyons donc attentifs aux anges, aux rencontres sur nos chemins. C’est ainsi que Dieu fait irruption dans nos vies pour nous donner une identité et pour nous mettre en chemin par ce qui germe en nous.

Amen

Pasteur Bernard Dernoncourt
Le 18 décembre 2011

Sources: Lire et Dire, n°ID46 d.