La résurrection dans le judaïsme et le Nouveau Testament

En Actes 23,8 , nous voyons que pharisiens (1) et sadducéens (2) s’opposent sur la question de la résurrection :

« Les sadducéens disent qu’il n’y a point de résurrection, et qu’il n’existe ni ange ni esprit tandis que les pharisiens affirment les deux choses. »

Pour les sadducéens, l’âme s’éteint lors de la mort. Les pharisiens, de leur côté, font remarquer qu’en niant l’au-delà, on rejette l’idée de sanction, récompense et châtiment post mortem. Les sadducéens justifient leur position en disant que la résurrection n’est pas affirmée dans le Pentateuque (ou loi de Moïse ou Tora, qui, pour les juifs, contient la totalité de la doctrine biblique).

Pourtant, plusieurs textes du Pentateuque impliquent l’idée de vie future, par exemple Genèse 5,24 sur l’enlèvement d’Hénoc :

« Hénoc marcha avec Dieu; puis il ne fut plus, parce que Dieu le prit. »

Cet enseignement est précisé par Hébreux 11,5 :

« C’est par la foi qu’Hénoc fut enlevé pour qu’il ne voie point la mort, et qu’il ne paraisse plus parce que Dieu l’avait enlevé; car, avant son enlèvement, il avait reçu le témoignage qu’il était agréable à Dieu. »

Genèse 3,22 nous indique également qu’avant leur expulsion d’Éden, Adam et Ève jouissaient de l’immortalité :

« L’Eternel Dieu dit : Voici, l’homme est devenu comme l’un de nous, pour la connaissance du bien et du mal. Empêchons-le maintenant d’avancer sa main, de prendre de l’arbre de vie, d’en manger, et de vivre éternellement. »

On peut aussi déduire de Genèse 3,24 que les anges ne sont pas sujets à la mort :

« C’est ainsi qu’il chassa Adam; et mit à l’orient du jardin d’Éden les chérubins qui agitent une épée flamboyante, pour garder le chemin de l’arbre de vie. »

Sur le passage de la mort à la résurrection, Paul qui est un ancien pharisien, recourt en 1 Corinthiens 15,35-37, à l’analogie du blé :

« Mais quelqu’un dira : comment les morts ressuscitent-ils, et avec quel corps reviennent-ils ?
Insensé ! Ce que tu sèmes ne reprend point vie, s’il ne meurt. Et ce que tu sèmes, ce n’est pas le corps qui naîtra; c’est un simple grain, de blé peut-être, ou de quelle qu’autre semence. »

Ce n’est pas le grain qui sort de terre, mais l’épi. C’est une grande transformation qui s’opère, puisqu’elle nécessite la décomposition (la mort) du grain.

Le Talmud (3) utilise également cette parabole en disant: « Le grain est confié nu à la terre, il en sort revêtu de plus d’une parure: à plus forte raison les justes qu’on a ensevelis couverts de leur habillement » (càd la foi et la charité), sous-entendu, « ressusciteront avec un corps nouveau ».

Le texte de Proverbes 6,22, concernant les préceptes de l’Écriture :

« Ils te dirigeront dans ta marche, ils te garderont sur ta couche, ils te parleront à ton réveil »

est commenté ainsi par les rabbins :« Quand tu marches, ils te conduiront, en ce monde; quand tu te couches, ils veilleront sur toi,dans la tombe; quand tu t’éveilleras, ils s’avanceront avec toi, dans le monde à venir. » Et encore : « quiconque fait usage de la lumière de la Tora (la Bible), fera revivre la lumière de la Tora dans le monde à venir. » (4)

Jésus a-t-il été plus précis sur ces questions ?

Relisons les deux textes complémentaires de Matthieu 22,23-33 et de Luc 20,27-40, dans lesquels les sadducéens veulent faire apparaître le côté irréaliste de la résurrection. Pour rappel, les sadducéens évoquent dans ce texte la loi biblique qui prescrit à un homme d’épouser la veuve de son frère (pratique ancienne du lévirat) et imaginent que la situation se reproduise avec plusieurs frères ayant successivement épousé la même femme (comme dans l’ histoire de Tamar, belle-fille du patriarche Juda, en Genèse 38). A la résurrection, avec qui cette femme va-t-elle vivre ?

En Matthieu, Jésus répond qu’il ne faut pas sous-estimer la puissance de Dieu et qu’à la résurrection, les gens ne vivront plus dans les liens du mariage, ils seront comme les anges. Et Luc précise encore que

« ceux qui seront trouvés dignes d’avoir part au siècle à venir et à la résurrection des morts, ne se marieront plus, car ils ne pourront plus mourir, étant semblables aux anges. » (5)

Dans l’optique chrétienne, l’accès au monde à venir est en relation avec la mort et la résurrection de Jésus. En effet, la mort de Jésus représente dans le Nouveau Testament l’amnistie, ou acquittement aux frais de Dieu de l’humanité pécheresse, pour tous ceux qui sont à l’écoute de son enseignement et bénéficient dès lors de la même résurrection.

Jean CHARLES


1 Pharisiens : parti des docteurs de la Loi
2 Sadducéens : parti des prêtres
3 Le Talmud, par A.Cohen, Payot, Paris, 1982 – Page 431
4 Le Talmud, par A.Cohen, Payot, Paris, 1982 – Pages 434, 435 et 429, 430.
5 Tous les textes bibliques cités sont extraits de la version L.Segond traditionnelle.